samedi 22 septembre 2012

L'Italie, l'autre pays de la japanim

Cet article peut comporter des erreurs, ne sachant pas lire l'italien, j'ai du faire avec ce que je pouvais pour la redaction de ce texte

Si la France est devenu le 2eme pays consommateur de manga au monde, pour l'animation, nous avons toujours ete clairement derriere l'Italie qui, sans etre un "Japon bis" a eu la chance de connaitre une bonne partie de ce que la japanim (tele essentiellement) a produit du debut des annees 70 au milieu des annees 80. D'ailleurs, 95% des anime diffuses chez nous sur feu La Cinq venaient directement d'Italie (et etaient meme carrement en italien! Les traducteurs et doubleurs travaillaient a partir de la version italienne et non japonaise!)
Certes, a la grande epoque Club Dorothee/La Cinq, on etait abreuve de japanim jusqu'a l'overdose. Mais les Italiens l'etaient deja depuis longtemps.


Les premiers anime a debarquer en Italie etaient des films distribues en salles des le debut des annees 60 comme La Legende du Serpent Blanc, le 1er film de la Toei Animation. Le Chat Botte, embleme de la societe, sera lui aussi diffuse, en 1969.

Toutefois, le veritable tournant se situe en 1976, avec Barbapapa (sur la chaine Rai 2), premier dessin anime nippon a passer a la TV, puis en Janvier 1977 par Vicky le Viking, et en 1978 par Heidi et SURTOUT UFO Robot Grendizer (Atlas UFO Robot Goldrake de son nom italien).

Goldrake debarque en Italie (scan d'un magazine TV local d'Avril 78, qui consacre deja 4 pages a celui qui va boulverser a jamais toute une generation)

Bon, jusque la, ce n'est guere different de la France, les films cinema n'ayant jamais ete des gros succes, et les series pre-Grendizer completement "familiales".
Grendizer debarque donc en 78, a quelques semaines de difference avec la France.
Le succes sera au moins aussi important, et meme sans doute davatange. Si on regarde sur le Net, c'est clairement dans la communaute italienne qu'on trouve le plus de sites/videos/fanart/etc, il existe meme des ouvrages recents entierement consacres au sujet (les chanceux!) Quant aux generiques locaux, il beneficient d'une aura au moins egale a celui de Noam en France. Il n'y a pas un Italien trentenaire qui ne puisse les fredonner.


Les 1er opening et ending (il y en aura plusieurs)

C'est a partir de la que les choses vont differer. Jusqu'en 1987, la France est tres peu approvisionnee en japanim, meme si la plupart des titres importes sont souvent des grands succes (Harlock, Cobra, Cat's Eye...)
L'Italie elle, en a eu peut-etre par centaines... Pour comprendre cet engouement (Grendizer n'est bien sur pas la seule raison), il faut connaitre le PAF italien de cette epoque. En 1976, la television d'Etat est liberalisee et donne naissance a des tonnes de chaines locales privees.
Aucune chaine n'etait autorisee a etablir de reseau national, en raison des lois qui protegaient la suprematie de la television d'Etat, de sorte que chaque canal ne disposait que d'un budget tres faible. Ce qui signifie que chaque chaine etait a la recherche de programmes de divertissement peu onereux, surtout pour les enfants. Resultat: tout le pays a ete inonde de DA japonais. Sans aller jusqu'a dire que tous les anime de cette periode sont passes en Italie, il y en a quand meme eu une bonne partie (3 a 4 heures par jour!), a commencer par les series de robots. Ils ont quasiment tout eu, c'est rageant. Si aucun n'a egale Grendizer en popularite, certains s'en sont approches, comme Jeeg ou Daitarn 3, qui restent des icones de la japanim en Italie.
C'est meme le seul pays (hors Japon of course) qui a passe la 1ere serie de Gundam!! Mais de maniere illegale... Je ne connais pas les details de l'affaire, mais toujours est-il que quand les ayant-droits japonais ont vu ca, ils ont bloque les droits de la licence a l'export pour de longues annees (il faudra attendre les OVA de Gundam 0083 en version americaine en 92 pour ENFIN avoir la chance de visionner du Gundam hors de l'Archipel).

Daitarn 3
Gundam

Les series etaient non-censurees, beneficiaient souvent d'un bon doublage, et les generiques etaient entrainants. Les chansons etaient souvent composees par des artistes celebres, parfois en gardant la melodie originale japonaise. Toutefois, le cote "festif" de certains generiques n'etait pas toujours du plus adequat...

Ce fameux DA comique qu'est Captain Harlock...
ou Yamato!

Le merchandising fut enorme. D'ailleurs, nombre de produits que nous avons eu en France (sur Grendizer, Harlock, ou Candy notamment) venaient directement d'Italie! A commencer par nombre de BD plus ou moins reussies...
Un groupe comme GIG (le Toy's R Us italien) proposait un panel de produits dont meme les petits Nippons auraient pu etre envieux. Tous les trentenaires ont forcement possede a un moment ou a un autre un objet quelconque issu d'un DA japonais.

Un jeu de plateau sur Harlock 200% made in Italy

Helas, comme ce sera le cas en France quelques annees plus tard, une campagne anti-DA japonais particulierement virulente sevit chez nos voisins. Resultat: le flot se tarit, seul resiste le reseau Fininvest (de Berlusconi), mais qui modifie sa programmation. Fini les DA violents comme Tiger Mask (diffuse entierement non-censure, alors qu'il s'agit d'un des anime les plus sanglants jamais crees!) ou Yamato; desormais on se concentre sur les series de sport, de magical girl, de love comedy, ou d'adaptations de romans europeens. Bref, tout ce qu'on a vu sur La Cinq, normal vu que tout venait d'Italie. Mais a l'instar de AB Productions, on infantilise les dialogues et les generiques (neanmoins globalement d'une qualite superieure, ce qui n'est pas bien difficile il est vrai; notons d'ailleurs que les memes melodies sont reutilisees pour les versions francaises, mais pas sur les memes DA!), et les ciseaux de la censure accomplissent leurs tristes offices sur des scenes jugees limite (comme dans Kimagure Orange Road par exemple).
Certes, Hokuto no Ken a eu un grand succes la-bas, mais il etait diffuse en prime-time, et presente comme une serie pour un public age.
Ca n'a pas empeche bien sur des bons gros shonen d'etre diffuses, comme Dragon Ball ou Saint Seiya, mais leur part etait tres faible niveau pourcentage global.

Ken le Guerrier

Johnny, c'est presque de la Magie

Lupin 3, dont la melodie a servi chez nous pour Captain Tsubasa!

Notons neanmoins que Grendizer mis a part, LE DA japonais culte en Italie est... Lupin III. Et ce, encore aujourd'hui.

212 pages entierement dediees au grand cornu et son impact en Italie! Pour une traduction, je pense qu'on peut attendre longtemps (ouvrage sorti en 2007)

Et un autre de 196 pages (2007 toujours) consacre aux robots dans l'animation nippone! Le jour ou on verra ca en France...

Puis, parallelement a ce tarissement de series TV, le fandom de japanim VO commence a se developper. Les fans s'echangent anime transcodes, CD de musiques et manga importes a prix d'or, publient des fanzines... bref, comme en France mais la encore, avec une bonne longueur d'avance. Un editeur video specialise comme Yamato envahit tres tot le marche, et propose aux fans de l'animation beaucoup plus adulte (essentiellement des OVA). Meme si, bien entendu, ca demeure un marche de niche.
Puis l'evolution jusqu'a nos jours sera grosso modo la meme qu'en France: timide retour sur le hertzien, explosion de la video et du manga, phenomene du fansub, etc.

Le 1er numero du fanzine Yamato, en 1990 (mon cousin l'avait achete a l'epoque, j'ai encore les photocopies)

Mais la grosse difference, c'est que les fans de la 1ere heure (et meme les plus jeunes s'ils le veulent) disposent d'une solide culture japanim, bien superieure a celle de leurs homologues hexagonaux. Certains vieux titres gardent toujours une aura intemporelle (Grendizer, Lupin, Daitarn 3...) et font desormais partie du patrimoine du pays.
Pour resumer, non seulement les Italiens ont beneficie a peu pres de tous les anime qu'on a eu en France, mais en plus de la quasi-integralite du catalogue (series TV) existant au moins du debut annees 70 au milieu des annees 80. Resultat: certains titres incontournables, indispensables a la comprehension de l'animation japonaise en tant que sous-culture, et qui nous ont cruellement manque en France, comme Yamato, Tiger Mask, Gundam... font veritablement partie la-bas des bases du trentenaire moyen, meme s'il n'est pas devenu anime-fan une fois adulte. Quant a Go Nagai et Leiji Matsumoto, il jouissent chez bon nombre d'animefans d'une tres grande veneration bien meritee, a des annees-lumieres de la France (helas!)

Tiger Mask, un generique tres sympa

5 commentaires:

  1. Article très complet mon bon LVD.
    Voici d'ailleurs un site très complet sur le robotto anime des années 70-80 (mais en italien) : http://www.encirobot.com/
    Si besoin est, parlant couramment l'italien, je peux te filer un coup de main ;)
    C'est d'ailleurs lors de mes vacances là-bas que j'ai découvert des séries telles que Godsigma, Godmars, Daitarn 3, ou encore les "suites" japonaises de Transformers... Séries que j'ai ensuite "approfondies" par les Super Robot Wars (j'ai joué à quasiment tous les épisodes, toutes consoles confondues)

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  2. Je connais ce fabuleux site (j'en ai d'ailleurs repris des images)
    Disons qu'il y a une chose que je recherche, c'est les dessous de l'affaire Gundam. Je sais que ca ete diffuse illegalement mais comment/pourquoi?

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  3. Super article, comme toujours
    Je savais que l'Italie avait été un grand consommateur d'anime mais pas à ce point là.

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  4. Bon article!
    Etant de famille italienne, étant plus jeune, avec mes parents, nous retournions assez souvent en Italie pendant les vacances visiter la famille là-bas.
    C'est à 'occasion de ces vacances que j'ai découvert pas mal de DA japonais qui nous étaient totalement inconnus. Et le nombre de série mettant en scène des robots! J'en bavais!
    C'étaient les années 80 et j'y ai découvert Jeeg, Mazinger, Zambot 3, Daitarn 3, Tiger Mask,Il Tulipano Nero, Arbagas (ou un truc du genre dans les années 90 celui-là), etc...
    De bons souvenirs ;)

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